L’Administration des Ponts et Chaussées de Liège : Un témoin de l’histoire et de l’architecture de la ville
Rue Forgeur n° 2 à Liège, une adresse qui fait écho à l’histoire de la ville, mais aussi à celle des grands travaux publics. Ici, à l’angle de la rue Forgeur, se dresse un bâtiment emblématique qui, au-delà de sa fonction administrative, incarne l’évolution de Liège pendant le XIXe siècle. Construit en 1877, il porte le nom de l’Administration des Ponts et Chaussées, un service essentiel de l’État belge, et reste l’un des derniers témoins de l’architecture néoclassique dans la région.
Une rue et un nom, un hommage à Joseph Forgeur
La rue Forgeur, percée entre 1877 et 1878, rend hommage à Joseph Forgeur (1802-1872), un avocat et sénateur belge, figure marquante de l’indépendance du pays. Membre du Congrès national en 1830, Forgeur a joué un rôle clé dans les premières années de la Belgique indépendante. Ce choix de dénomination reflète l’importance de l’homme dans l’histoire politique belge et, par extension, l’importance de l’institution qui allait s’y établir.
Un bâtiment au style néoclassique remarquable
Édifié en 1877 pour abriter l’Administration des Ponts et Chaussées, cet immeuble se distingue par son architecture néoclassique, un style privilégié pour les grandes constructions publiques de l’époque. La façade, réalisée en tuffeau et calcaire, impose une stature imposante avec ses trois niveaux, chacun composé de sept travées encadrées de pilastres corinthiens. Ces pilastres, associés à des bandeaux saillants en calcaire, confèrent à l’édifice une grande verticalité et une élégance sobre.
L’entrée principale, surmontée d’un fronton cintré figuré, est soulignée par une travée axiale plus large et en léger ressaut. Ce détail architectural, typique du style néoclassique, évoque la symétrie et l’équilibre cherché dans les grandes constructions de l’époque. Les fenêtres, au linteau échancré et à la clé moulurée, rappellent les influences classiques tout en apportant une touche de raffinement.
La toiture, à la Mansart, termine ce chef-d’œuvre architectural. Bien que ce type de toiture soit traditionnellement associé à des bâtiments résidentiels, ici il témoigne d’une volonté de donner au bâtiment une allure à la fois majestueuse et fonctionnelle. Deux lucarnes cintrées modernes ont été ajoutées au brisis, rendant hommage à l’architecture d’origine tout en modernisant la structure.
L’Administration des Ponts et Chaussées : Un rôle clé dans l’histoire de Liège
Si le bâtiment est d’une grande valeur architecturale, il l’est aussi pour sa fonction historique. L’Administration des Ponts et Chaussées de Liège, qui a existé pendant plus de 150 ans (jusqu’en 1990), était responsable de plusieurs domaines cruciaux pour le développement de la ville et de la région.
Les ponts et les routes de l’État
L’Administration supervisait la construction, l’entretien et l’amélioration des ponts et routes de l’État, mais aussi des infrastructures plus locales. Elle était également en charge des demandes d’autorisations pour la modification des routes ou la construction d’installations particulières, telles que les carrières ou les bâtiments industriels.
Ce rôle était essentiel dans une époque où Liège, cœur industriel de la Belgique, connaissait un développement rapide et une urbanisation croissante.
Les bâtiments de l’État
L’Administration gérait également la construction et l’entretien de bâtiments publics, tels que le Palais des Princes-Évêques, l’Université. À Liège, elle s’assurait de la bonne condition des infrastructures administratives et éducatives, tant dans la ville qu’à Verviers et Huy.
Les transports en commun et les chemins de fer
Jusqu’à la fin du XIXe siècle, l’Administration jouait un rôle majeur dans le réseau ferroviaire en Belgique. Elle était responsable de l’entretien des lignes de chemin de fer de l’État et des concessions privées, tout en supervisant la construction des premières lignes de tramways.
Les voies hydrauliques
Un autre domaine d’intervention majeur était celui des voies navigables. L’Administration gérait le cours de la Meuse, de l’Ourthe et de la Sambre, ainsi que les canaux et barrages dans la région. Le canal Meuse-Moselle ou le barrage de la Gileppe sont des projets emblématiques de cette époque. Ce service s’occupait également de la gestion des industries situées le long de ces cours d’eau, une tâche indispensable pour le développement industriel de la région.
Une rénovation respectueuse du patrimoine
Il y a quelques années, le bureau d’architecture Audex a entrepris une rénovation du bâtiment, dans un souci de respecter son caractère historique tout en lui permettant de répondre aux besoins actuels. Cette rénovation a permis de préserver l’essence du bâtiment tout en modernisant les espaces intérieurs, garantissant ainsi la pérennité du lieu pour les années à venir.
Aujourd’hui, l’Administration des Ponts et Chaussées de Liège n’est pas seulement un lieu de mémoire, mais aussi un témoignage vivant de l’histoire administrative et architecturale de la ville. Il reste l’un des derniers bâtiments de ce type en Wallonie, un véritable témoin du passé et un symbole de la grandeur industrielle de Liège.
Conclusion
L’Administration des Ponts et Chaussées à Liège est bien plus qu’un simple édifice fonctionnel. C’est un symbole de l’histoire de la ville et de son développement au XIXe siècle, un exemple de l’architecture néoclassique qui a marqué l’époque des grandes infrastructures publiques. À travers ses façades majestueuses et ses fonctions d’autrefois, ce bâtiment nous raconte l’histoire de Liège, une ville en pleine expansion et transformation. Préservé pour les générations futures, il continue de faire vivre cette mémoire collective, à l’image de la rue Forgeur qui, elle aussi, a traversé les âges en portant l’héritage de Joseph Forgeur.
