Derniers regards sur une fresque monumentale de Luis Salazar à Liège
À deux pas du Val Benoît, sur une façade discrète mais imposante d’un ancien bâtiment administratif de la Région Wallonne, se cache une œuvre d’art exceptionnelle. Monumentale, colorée, vibrante : cette fresque abstraite signée Luis Salazar recouvre près de 600 m² de mur. Elle date des années 1980 et incarne à elle seule une page de l’histoire du street art liégeois. Et pourtant, elle s’apprête à disparaître.
Racheté récemment par l’entreprise Moury, le bâtiment – vide depuis plusieurs années – sera bientôt transformé en immeuble résidentiel. Si le projet de rénovation sonne comme une renaissance pour les lieux, il marquera aussi la fin d’une œuvre emblématique. Une œuvre que peu connaissent, mais qui mérite d’être vue, photographiée, ressentie… tant qu’il est encore temps.
Né au Pays basque en 1956, Luis Salazar arrive à Liège une dizaine d’années plus tard avec sa famille, exilée sous la dictature franquiste. Très tôt, il s’oriente vers l’art et intègre l’Académie des Beaux-Arts de Liège, où il se forme à la peinture monumentale. Ce goût pour le grand format ne le quittera jamais.
Son univers est abstrait, mais plein d’émotion ; foisonnant de couleurs, mais toujours cohérent. Son langage pictural est libre, généreux, parfois explosif – toujours profondément humain. Salazar a exposé partout : en Belgique, en Europe, et bien au-delà. En 2019, le Musée de la Boverie lui consacrait une rétrospective saluée pour ses 40 ans de création. En 2022, l’exposition Pastels à la Cité Miroir prolongeait ce dialogue entre l’artiste et le public liégeois. Aujourd’hui encore, ses œuvres continuent de vivre et de soigner : cinq sculptures en acier peint ornent depuis 2022 le service d’oncologie du CHU de Liège.
Mais cette fresque, elle, est éphémère. Encore visible quelques semaines ou quelques mois – personne ne sait vraiment – elle mérite qu’on s’y arrête. Non seulement pour saluer le talent de Luis Salazar, mais aussi pour réinterroger notre rapport à l’art dans l’espace public : que garde-t-on ? Que sacrifie-t-on ?
Alors, si vous passez près du Val Benoît, levez les yeux. Offrez-vous ce moment de couleurs et de mémoire. Avant qu’il ne soit trop tard.



