Tradition et Modernité : La Collaboration Jaspar-Rassenfosse à Liège

Dans les cercles intellectuels progressistes et symbolistes de Liège à la fin du XIXe siècle, l’architecture et les arts étaient en pleine effervescence. Au cœur de cette ébullition créative se trouvaient deux figures majeures : l’architecte Paul Jaspar et l’artiste Armand Rassenfosse. Leur collaboration a donné naissance à des œuvres emblématiques qui marquent encore aujourd’hui le paysage culturel de la ville. Plongerons-nous dans l’univers fascinant de ces deux visionnaires, en explorant leurs réalisations et leur impact sur l’Architecture et les Arts à Liège et bien au-delà.

La Maison de Paul Jaspar pour Armand Rassenfosse

Dans le sillage de l’Art Nouveau émergeant à Liège, Paul Jaspar a conçu en 1898 une maison emblématique pour son ami et collaborateur, Armand Rassenfosse. Située rue Saint-Gilles, cette résidence se distingue par son mariage audacieux entre tradition et modernité. La façade asymétrique, en brique et en pierre, reflète l’influence de l’architecture traditionnelle liégeoise, tandis que l’utilisation de l’ossature métallique témoigne de l’approche novatrice de Jaspar. L’intérieur révèle une attention particulière à la lumière naturelle, avec de nombreuses baies et un lanterneau dans l’atelier au sommet. La disposition des espaces, du salon à l’atelier, reflète la vision de Rassenfosse et son besoin d’un espace créatif inspirant.

Armand Rassenfosse

Armand Rassenfosse, né en 1862 à Liège, était bien plus qu’un artiste polyvalent. Autodidacte aux profondes attaches liégeoises et wallonnes, d’un modernisme classique, il s’inscrit dans un courant artistique et intellectuel directement issu du Symbolisme et de l’Art Nouveau.

Issu d’un milieu bourgeois aisé, Rassenfosse est initialement contraint de reprendre le commerce de porcelaine et d’objets décoratifs de sa famille. Cultivant parallèlement un goût pour l’Art, il pratique le dessin et suit l’enseignement d’Adrien De Witte, professeur à l’Académie des Beaux-Arts de Liège. Celui-ci lui conseille de s’essayer à différentes techniques, notamment la pyrogravure. Élève de Félicien Rops, il a aussi révolutionné l’art de la gravure et de l’illustration, collaborant avec les principaux affichistes de son époque. Avec Émile Berchmans et Auguste Donnay, il est l’un des principaux affichistes de l’imprimerie d’Auguste Bénard à Liège : la collaboration entre les trois artistes liégeois et l’imprimeur français est à la base d’une production graphique à l’avant-garde de l’art de l’affiche en Europe à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Son style, imprégné de symbolisme et d’Art Nouveau, témoigne d’une sensibilité artistique unique. Mais au-delà de ses réalisations, Rassenfosse incarnait l’esprit de son temps, mêlant engagement social et quête esthétique. Une de ses œuvres célèbres, l’illustration des “Fleurs du mal” de Charles Baudelaire en 1899 pour la Société des Cent Bibliophiles de Paris est un exemple saisissant de son talent et de son impact dans le monde de l’édition et de l’illustration. Il décède à Liège le 28 janvier 1934, il est alors âgé de 72 ans, il est inhumé au cimetière de Saint-Gilles sur les hauteurs de sa ville natale.

Et pour conclure,,,

L’œuvre de Rassenfosse a laissé une empreinte indélébile dans le monde de l’art graphique en particulier. Ses affiches, dont la célèbre “Grande brasserie Van Velsen”, sont des exemples remarquables de son influence sur l’art de l’affiche en Europe. Quant à Jaspar, sa maison pour Armand Rassenfosse représente un jalon dans l’histoire de l’architecture régionaliste à Liège. Son approche innovante, alliant tradition et modernité, a inspiré de nombreux autres architectes et urbanistes.

À travers la collaboration de Paul Jaspar et Armand Rassenfosse, nous découvrons un pan fascinant de l’histoire artistique et architecturale de Liège. Leur vision audacieuse et leur engagement envers l’innovation ont laissé une empreinte indélébile sur notre ville et ont enrichi notre paysage culturel et artistique. En revisitant leur travail, nous célébrons non seulement leur génie créatif, mais aussi l’esprit de collaboration et d’exploration qui caractérisait cette période florissante de l’histoire de l’art et de l’architecture.